B comme la Briqueterie MOUTON-ROY

ou

Mes deux chances dans ma généalogie

1ère chance :

Par un beau dimanche hivernal, lors d’une ballade avec mon époux dans le centre ville de Chartres (28), une banderole indique une exposition généalogique à l’Hôtel de Ville. Nous sommes d’un naturel curieux. Et, si nous poussions la porte ??? Nous naviguons de stand en stand, quand, soudain OH surprise ! «  N’est-ce pas la photo de Marcel ROY ton grand-père ? » dis-je à Jean-Pierre. La famille MOUTON-HACQUIN nous accueille avec beaucoup de gentillesse. La semaine suivante nous troquons leur arbre généalogique contre des photos de la famille nous voila avec plein de cousins supplémentaires . Quelle chance.


2ème Chance :

Depuis 1968 que je travaille au « Conseil Général d’Eure-et-Loir, au service des affaires sanitaires et sociales », je commence à m’ennuyer, j’ai envie de voir autres choses. Un poste se libère aux Archives Départementales. Je postule, je suis retenue et je suis affectée au service des cartes et plans, Série F et P des archives départementales. Ces archives viennent d’emménager sur un nouveau site où il reste à déballer, trier et indexer les plans napoléoniens, les plans des seigneuries, plans des communes et des écoles réalisés par les instituteurs... Il faut préciser que sur ce nouveau site le département héberge les 2 associations de généalogie le CRGPG (Cercle de Recherche Généalogique du Perche Gouet) et la SGEL (Société de Généalogie d’Eure-et-Loir). C’est à ce moment que le président de la SGEL, M PIRIOU me met en relation avec M Jean-Pierre M. qui désire faire un écrit sur les Briqueteries d’Eure-et-Loir. (Mon mari, Jean-Pierre ROY étant le Petit-fils de ROY Marcel et l’arrière-petit-fils de MOUTON Henri)

Nous allons aborder la généalogie de la chaufournerie-tuilerie.

Louis Paul DAMARS naît en 1795 à Dreux, fils d’Etienne Damars conducteur des Ponts et Chaussées. En 1813, il a 18 ans et fait preuve de qualité exceptionnelles, 1816 li est nommé architecte voyer de Chartres. De 1826 à 1843 il élu au Conseil municipal de Chartres. En 1847 il est nommé Lieutenant colonel de la garde nationale de Chartres. En juillet 1849 il est élu juge au tribunal de commerce. En 1824 il achète avec son frère Etienne Marie le clos des Crépinières où ils installent leurs fours à chaux En 1831 ils sont obligés de construire une haute cheminée.

Soucieux d’assurer sa succession, Louis Paul Damars devenu rapidement le seul propriétaire de la briqueterie tuilerie, la transmettra (ainsi que son cabinet d’architecte) à son associé Nicaise Hippolyte Mouton qui, de ce fait participera à l’exposition universelle de 1855.

Nicaise Hippolyte Mouton né le 11/10/1823 à Chartres, (d’une lignée de laboureurs, vignerons, jardiniers, maraîchers) sera d’abord employé de Louis Paul Damars, puis associé de son patron, avant de devenir lui-même architecte indépendant et propriétaire de la chaufournerie-tuilerie des Petits Blés à Chartres

A l’issue de l’Exposition universelle de 1855, les « Rapports du jury Mixte International publiés sous la direction de SAI le Prince Napoléon, président de la Commission impériale » consacre un long développement de la chaufournerie-tuilerie des Petite Blés.


« M MOUTON exploite l’établissement fondé en 1825 par M Damars architecte à Chartres. Cet établissement consiste en une Chaufournerie et une tuilerie qui se trouvent aux Petits Blés. Il occupe en moyenne 30 ouvriers et il a de plus 8 ouvriers aux carrières. Le prix de la journée varie de 2 à 4 francs. 4 manèges mus par des chevaux, opèrent le broyage ainsi que le mélange des matières qui servent à fabriquer la chaux hydraulique artificielle. La chaux hydraulique de Chartres artificielle, est fabriqué d’après le procédé ordinaire en mélangeant quatre parties de craie marneuse et une partie d’argile bien exempte de sable. La cuisson a lieu dans des fours à chaux continus qui sont chauffés à la houille. Elle fait prise sous l’eau en 8 jours. »


En 1870 Nicaise Hippolyte Mouton va créer avec d’autres fabricants de briques, tuiles, chaux et ciments, « L’union Céramique et Chaufournière de France », laquelle sera érigée en chambre syndicale.

Marié le 21 novembre 1848 à Chartres avec Louise Amandine Henriette Torcheux, il aura deux fils : Armand Pierre Nicaise Mouton et Henri Emile Mouton. L’aîné succédera à son père comme architecte, le cadet, reprendra l’activité de la briqueterie-tuilerie des Petits Blés.

Photo 03

Armand Mouton

On retient d’Armand Mouton (1850-1935), bachelier es-lettres et es-sciences, Architecte, les réalisations suivantes : l’école supérieur de garçons de Bonneval et celle d’Illiers et différentes écoles communales, la chapelle de la Vierge dans l’église de Nogent-le-Roi , le temple protestant de Chartres. Il a également fait les plans d’autres bâtiments tels que l’Hôtel-Dieu, l’Hospice Saint-Brice de Chartres et diverses maisons bourgeoises et de commerces.

Inspecteur diocésain en 1881, il est mentionné en qualité d’officier d’académie et d’architecte de la vile de Chartres en 1903. De son mariage célébré en 1877 à Saint-Léger-des-Aubées avec Julie Henriette Maunoury naîtront quatre filles dont, dans la descendance de l’une d’elle, on trouve le nom de l’aviatrice Catherine Maunoury, championne française de voltige aérienne et première femme directrice du Musée de l’air et de l’espace.



Armand MOUTON

Henri MOUTON


Henri Mouton (1852-1913)

Le fils cadet va succéder avec succès à son père dans l’exploitation de la briqueterie. Dans la continuité de celui-ci, pour la qualité de sa production, il obtiendra une mention honorable à chacune des Expositions universelles de 1867 et 1878. En 1867, pour les poteries et en 1878 pour les briques, carreaux de terre cuite,chaux hydraulique artificielle et chaux grasse.

Puis ayant obtenu une médaille d’argent cette fois-ci, à l’Exposition universelle de 1889, (pour mémoire, la tour Eiffel fut construite à l’occasion de cette exposition) il en fera un argument promotionnel comme le montre l’encart ci-dessous, paru dans l’Annuaire et des travaux publics de 1903





Les références qui y sont citées concernant les édifices publics construits pour la plupart à Paris sont impressionnantes par leur diversité et leur importance : des écoles (rue du Louvre, avenue Daumesnil, rue Michel Bizot), des lycées (Lakanal, Buffon, Molière), des facultés (la Sorbonne, la faculté des sciences) des hôpitaux (les Enfants Malades, Beaujon), des gares (gare de l’Est, gare des Invalides), la salle des fêtes de la mairie de Vaugirard, la caserne des Célestins, l’Exposition universelle de 1900…

Presque tous ces édifices sont encore là et on peut toujours reconnaître les briques blanches fabriquées à la briqueterie tuilerie des Petits Blés.

A Chartres même, quelques belles maisons bourgeoises ainsi que l’école normale de filles ont été construites avec les briques chartraines estampillées HM. En effet, depuis les 18 mai 1886 et 11 janvier 1904, les Mouton détenaient la propriété exclusive des deux marques de fabrique «H.M » et en 1907 «  Brique de Chartres »

Les précisions qu’Henri Mouton, qui fut Président de la chambre de commerce d’Eure-et-Loir, donne à la Société Archéologique d’Eure-et-Loir, lors de sa séance du 7 mars 1882, sont particulièrement intéressantes sur l’approvisionnement des briqueteries

Henri Mouton et son fils Maurice ont créé le 23 février 1909 avec d’autres personnalités chartraines la « Société d’encouragement à l’aviation ».

Brisé par la mort prématurée de son fils Maurice (né en 1878) le 23 juillet 1909 qu’il avait commencé à associer à la marche de la briqueterie et, qui aurait dû à son tour lui succéder, Henri Mouton laissa la direction de la briqueterie et tuilerie à son gendre Marcel ROY, époux de sa fille Hélène (née en 1882).

Dans son hommage à Henri Mouton, l’Union Céramique parle d’un homme «  très travailleur, érudit et observateur » et indique qu’il cherchait « à obtenir des briques blanches de parfaite qualité pour maintenir la réputation des briques de Chartres. »

Marcel Roy

Avec Marcel Roy (1879-1965)), ce sera la quatrième (et dernière) génération d’entrepreneurs qui se sera succédé à la tête de la briqueterie-tuilerie des Petits Blés.

 Marcel ROY

Cette succession se fait avec réussite comme semble l’indiquer l’article suivant paru dans l’Illustration économique et financière de 1926 :

« Elle est exploitée par Marcel Roy, ingénieur E.C.P. Une machine à vapeur fournit une force de 80 chevaux, dont une partie est transformée en courant électrique alimentant des moteurs. Grâce à ses séchoirs artificiels et à ses fours à feu continu, la briqueterie marche toute l’année. Elle occupe une soixantaine d’ouvriers, et sa production annuelle est d’environ 15 000 tonnes de produits cuits, se répartissant en briques rouges pleines et creuses tuiles plates, poteries du bâtiment, et en briques blanches, ces dernières constituant une spécialité sous le nom de Briques de Chartres ».

La fabrication de ces briques blanches a été inaugurée par M. H. Mouton beau-père du propriétaire, et les premières qui sont sorties de l’usine ont servi aux façades latérales et intérieures de la Sorbonne (architecte, M. Nénot, membre de l’institut). Depuis, elles ont été employées dans nombre de constructions, telles que l’église Saint-Antoine, la gare Saint-Lazare l’institut de chimie, etc., à Paris et en province, à Nantes, Le Havre, Rouen, Angers, Fécamp, Limoges, Tours etc.

Pour revenir aux Petits Blés, Marcel Roy qui cumulera avec l’exercice de sa profession les fonction d’administrateur de la Banque de France et de directeur de la Caisse d’Allocations familiales, figurera comme briquetier à l’adresse du 60 rue de Reverdy, sur le Grand Annuaire Administratif Commercial et Agricole d’Eure-et-Loir jusqu’en 1937.


Briqueterie-tuilerie des Petits Blés à Chartres


                                                    Briqueterie-tuilerie des Petits Blés à Chartres

Les briques blanche de Chartres font toujours parler d’elles (voir le magazine « CHARTRES VOTRE VILLE N° 219 de MAI 2022 » page 101. Le conseiller municipal a écrit l’anecdote suivante « mieux vaut toucher une brique que d’avoir une tuile » !

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