Kaki
C’est la couleur affectée aux militaires. Quand je pense à eux et à mon enfance, c’est un temps très court mais très intense que j’ai vécu lorsque j’avais onze ou douze ans. Je pense que c’était pour le vingtième anniversaire de la fin de la deuxième guerre mondiale. Un largage de milliers de parachutistes a eu lieu au sud de la ferme juste au-dessus d’un pacage des brebis. Les militaires parachutés étaient partout. Quelques-uns étaient même blessés : les rochers et les murs du causse sont plutôt durs et quelque peu acérés. Nous avions dû conserver le troupeau à l’abri.
Je ne comprenais pas trop ce qui se passait et ce n’est que bien plus tard que j’ai compris que mon père était sans doute angoissé par les réminiscences que lui apportait cette commémoration.
Képi
Le képi, ce couvre-chef militaire, a toujours été symbole durant mon enfance de gendarmes. Pourtant, nous ne les voyions guère : il ne sont jamais venus à la maison. Ils ne passaient même pas devant la ferme (ou je n’étais pas là !). On ne les voyait qu’en allant à la foire ou lorsque l’alambic tournait à plein régime près du pont (pour l’eau) à Carennac. Je sais maintenant qu’ils jouaient (je peux utiliser cette expression parce que personne n’était dupe) aux gendarmes et aux trafiquants. En fait, ces derniers, c’étaient ceux qui apportaient leurs fruits pour la distillation et faire quelques litres de "goutte" (soit de l’eau de vie de marc soit de l’eau de vie de prunes). Les représentants de l’ordre surveillaient pour que les quotas soient respectés et les clients du bouilleur de cru tentaient de dépasser leur quantité maximale. De temps en temps, quelqu’un se faisait prendre mais, avec le recul des années, je crois que ça faisait partie du jeu ! L’alambic s’installe toujours mais il n’y a plus ce jeu du chat et de la souris et le bouilleur de cru travaille avec une administration tatillonne et paperassière.